Samedi 17 mai 2014
La route que nous allons parcourir aujourd'hui va être longue. Nous quittons Tamarindo et son littoral pour partir en montagne, du côté de Monteverde. Il nous faudra six heures pour atteindre notre destination car le manque d'informations routières puis la difficulté à trouver notre hébergement nous retarderont. Nous quittons Tamarindo vers 8h30, après avoir salué l'épouse du propriétaire belge du Bed and Breakfast où nous séjournions. Elle nous a indiqué le bureau de poste qui se trouve juste avant Villarreal, le village voisin, car France a quelques cartes postales à poster. Nous trouverons le bureau sans problèmes mais nous sommes samedi et il est fermé (ou pas encore ouvert, car il n'y a aucun horaire indiqué à l'entrée) et nous n’apercevons aucune boite aux lettres pour déposer les cartes. Décidément, ce pays ne semble pas fonctionner comme nous pour le courrier car, depuis notre arrivée, je n'ai encore jamais vu aucun boite aux lettres sur notre parcours. Qu'à cela ne tienne, nous reprenons notre route en direction de Santa Cruz. Nous y referons le plein d'essence, avant de nous engager dans la montagne, et le plein de vin Carménère pour le pot d'équipage de ce soir. Les Costariciens n'ont pas de vin (ou presque pas) mais en importent : il y a souvent un petit rayon de vins dans les magasins que nous croisons et nous y avons retrouvé le « Castillero del Diablo » sous toutes ses composantes (Cabernet-Sauvignon, Merlot, Shiraz, Malbec...et Carménère). Quelle opportunité de réhydratation après les rudes journées que nous passons ! Dans le Guanacaste, on trouve aussi, sur les routes, des étals qui vendent le vin de coyol. De tout temps, les autochtones ont préparé des boissons spiritueuses, un contenant alcoolisé issu de la fermentation de graines, plantes, racines et fruits divers. Un « vin » était déjà réalisé à partir du fruit du palmier appelé « coyol ». Le tronc de l'arbre était incisé à plusieurs endroits à l'aide de couteaux en pierre bien aiguisés pour en extraire la sève sucrée. Selon les Coyoleros (experts), les incisions devaient être faites à la lune croissante, par une personne ayant la main, pour obtenir la meilleure production possible. Le vin obtenu était alors réservé à certaines cérémonies religieuses et festivités. Il est de nos jours toujours en vente le long des routes.

Après nos courses à Santa Cruz, nous prenons la route vers Nicoya, pour rejoindre le pont de l'Amitié (en photo ci-dessus). Nous nous trouvons alors sur la route 18, celle qui nous conduire jusqu'à la Panaméricaine. Il nous faut franchir le golfe de Nicoya (pour quitter la Péninsule de Nicoya) ainsi que la rivière Tempisque. Ce pont nous y aidera. La rivière Tempisque que l'on peut parcourir dans la parc national Paloverde offre ici son plus large bassin (ci-dessous) avant de déboucher dans le Pacifique. La route 18 est asphaltée et ne pose pas de difficultés particulières. Là encore, la campagne environnante est verdoyante, d'un vert cru qui me fait penser à la Bretagne ou à la Normandie.

Notre prochaine étape est Las Juntas, une petite ville au pied des montagnes. Située sur la rivière Abangares, cette petite cité fut autrefois le centre de l'industrie minière aurifère du pays, de la fin du XIX è au début du XX è siècle. Elle s'est aujourd'hui reconvertie dans le tourisme. Ses petites maisons colorées en bois (ci-dessous), son joli parc (qui expose une ancienne locomotive qui servait jadis à tirer des wagonnets dans la mine), sa petite église catholique avec ses vitraux, son monument en l'honneur de tous ces mineurs qui contribuèrent à trouver l'or et l'argent dans les entrailles des montagnes alentours, parfois au péril de leur vie, et son éco-musée font partie des attractions locales.

Notre destination finale est Santa Helena, quelque part dans le Monteverde, et nous trouverons notre route à partir de Las Juntas. Sur notre chemin, nous nous arrêterons à l'éco-musée qui se trouve à 3 kilomètres de là. Au Costa Rica, mieux vaut être deux dans le véhicule : un conducteur et un copilote car les panneaux sont parfois inexistants, ou parfois dissimulés par des branchages. C'est le cas à Las Juntas. Nous trouverons finalement une petite piste conduisant jusqu'à La Sierra, un autre minuscule village qui contribua aussi au développement de l'industrie aurifère. On y croise des jeunes gens rassemblés autour de l'unique soda (restaurant local) du village. Je m'arrêterai plusieurs fois pour demander le chemin du musée car les parcours fléchés ne font pas partie de la tradition costaricienne. Un kilomètre de plus et nous atteignons notre but. Mais qui peut donc bien venir visiter un musée dans un endroit aussi reculé ?

Le canton d'Abangares fut et reste le canton minier du Costa Rica. C'est là que se concentra la plus importante extraction aurifère du pays. C'est précisément à La Sierra de Abangares (le minuscule village que nous venons de traverser) que prit forme cette exploitation minière, sous l'égide de Cooper Keith, un américain qui installa la première unité de traitement de l'or avec sa compagnie Abangares Gold Fields of Costa Rica. Las Juntas aussi possédait d'autres lieux d'extraction minière. C'est là que les mineurs convergeaient les fins de semaine pour y dépenser leur solde en jouant au poker. Le nom d'Abangares tient ses origines du terme « Avancari », lequel signifie le Dieu des eaux (ou Dieu des estuaires) en langue Nahuatl. On attribua ainsi force et fierté à la rivière qui traverse cette zone et qui porte le même nom que le canton. Le nom du district de La Sierra provient du cordon montagneux qui traverse la région. L'origine du nom de la ville Las Juntas, lui, tient dans ces rassemblements de mineurs chaque fin de semaine pour jouer au poker et prendre du bon temps (d'où le nom de Las Juntas).
L'éco-musée que je visite aujourd'hui fut créé en 1991, à l'endroit même où l'or était autrefois traité (les gisements se situant un peu plus loin dans la montagne, à dix kilomètres de là). On y voit les bâtiments et les machines qui contribuèrent alors à la fièvre de l'or costaricienne de l'époque.

L'histoire de la mine commence en 1884, lorsqu'un homme, Juan Alvarado Acosta, découvre de l'or. Il vend la mine à ses trois frères, Vicente, Paulino et rafael Acosta, lesquels la revendent en 1889 à la compagnie anglo américaine de développement minier. On exploita d'abord la fameuse mine puis on ouvrit de nouvelles saignées dans la montagne de La Sierra de Tilaran, à la recherche de nouveaux gisements. Des techniques nouvelles furent importées et les quantités d'or trouvées augmentèrent. Le cyanure et le mercure furent utilisés pour séparer l'or des autres éléments en utilisant un four spécial (en photo ci-dessous). On utilisa aussi bien d'autres matériels pour recueillir le précieux minerai et le traiter. L'éco-musée permet de découvrir ces objets dans une salle unique d'exposition mais aussi à l'extérieur (pour les machines). On peut ainsi admirer un ancien compresseur à air tout droit venu de New York dans les années 1900 (deuxième photo). Un ancien wagonnet est également exposé.


L'exploitation minière nécessita de nombreux ouvriers (jusqu'à mille) et permit un important développement local avec apparition de magasins, d’hôtels, d'ateliers, d'une unité de production électrique, du télégraphe et d'un hôpital. Les gens vinrent de différents endroits du pays et même d'autres pays d'Amérique centrale. La société d'exploitation fit beaucoup d'argent les premières années mais la crise financière de 1929 tout comme l'épuisement des gisements aurifères mit bientôt un point d'arrêt à cette activité.
Nous sommes accueillis par la guide, Kimberley Guadamuz (en photo ci-dessous). Elle nous confie que ce musée qui fut créé par les communautés des deux villes Las Juntas et La Sierra, témoigne de ce que fut l'exploitation minière à partir de 1884. une demi-tonne de précieux métal était produit tous les mois, dans les gisements situés à une dizaine de kilomètres de là, dans les montagnes. Les populations locales ne tirèrent malheureusement pas beaucoup de bénéfices de cette industrie, si ce n'est l'emploi créé sur place. Les accidents étaient autrefois nombreux, souvent dus à des inhalations de gaz ou à l'effondrement de galeries. Aujourd'hui, la sécurité est mieux assurée qu'avant et on ne déplore que rarement des morts ou des blessés. Désormais, des mines artisanales sont toujours exploitées mais à plus petite échelle. 2000 mineurs s'emploient à prélever l'or qui sera ensuite vendu à des artisans joailliers, pour en faire des bijoux.
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