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A la Découverte des Minorités Ethniques Chinoises au Musée de Shanghaï
(Shanghai, Chine)
Heure locale

Vendredi 28 décembre 2012

 

Décidément, je suis habitué aux vols sur Shanghaï. M'y revoici aujourd'hui, pour terminer l'année en beauté mais à moitié grippé. Qu'à cela ne tienne, je pars, emmitouflé, en direction de mon musée favori, le Musée de Shanghaï. Celui-ci va me permettre de vous faire découvrir les minorités ethniques de Chine. Celles-ci, au nombre de 56 sont reconnues par la constitution chinoise même si les Han représentent 92% de la population totale. On ne compte plu, à l'intérieur d'une même ethnie, les dialectes et variantes régionales, qui font de l'Empire du milieu l'un des pays les plus riches au monde, ethniquement parlant. Quant à la République de Chine (Taïwan), elle compte 14 minorités aborigènes à elle seule. Chaque Chinois ayant par exemple une certaine filiation à l'une des 55 ethnies autres que les Han, peut demander d'appartenir à la minorité dont il est originaire et adhérer ainsi à une culture ethnique faite d'un certain art de vivre, de coutumes, d'artisanat et d'art. Parmi les 55 ethnies minoritaires ( à l'exception des Hui et des Mandchous qui utilisent le dialecte chinois), 53 d'entre elles possèdent leur propre langue. 21 ont leur propre écriture et utilisent 27 systèmes d'écriture différents. Impressionnant n'est-ce pas?

L'ethnie majoritaire chinoise, les Hans, représente une population de plus d'un milliard de personnes, au sein de laquelle on trouve des différences culturelles et linguistiques énormes. Ainsi les Chinois du nord pratiquent le mandarin, tandis que les habitants de Shanghaï parlent le shanghaïen, les habitants des provinces de Fujian et de Taïwan, pratiquent la langue Min, ceux de la province du Hunan, la langue Xiang, et les habitants des provinces méridionales, les langues gan, wu, keijia, cantonaise...

L'exposition permanente que je visite aujourd'hui va me permettre d'entrer dans ce monde incroyable des nationalités chinoises dont les peuples Miao, Zhuang, Dong, Mulao,Maonan, Li, Yao, Tujia, She, Jing et Gaoshan. La visite débute par des costumes traditionnelles comme cette robe brodée et cousue à des manches rayées (ci-dessous) qui appartient au peuple Tu ( dont on compte actuellement quelques 242 000 membres). Celle-ci date de la seconde moitié du XX ème siècle.


 

Chaque ethnie est elle-même divisée en sous-groupes qui possèdent chacun leurs propres styles. Chaque groupe ethnique a ses propres coutumes et utilise divers matériaux pour fabriquer ses vêtements: Fourrure, coton, lin et soie. Ces derniers sont parfois décorés d'argent, de corail, d'agates ou de jades ou d'autres pierres précieuses... Les couleurs, motifs, styles et ornements associés sont nombreux. Et reflètent souvent un mode de vie, une croyance en une religion, un standard esthétique ou une région géographique. On découvre de jolis vêtements tissés, imprimés ( comme ce tissu ci-dessous) ou brodés dans cette exposition mais aussi des objets en métal, des objets laqués, des poteries, des masques et autres objets confectionnés témoignant de la joie de vivre de ces groupes multi-ethniques. Chaque sous-groupe possède des spécificités: Par exemple, chez les Tibétains, les trois sub-ethnies sont les Khampa (provenant du Kham, à l'est, à cheval entre la région autonome du Tibet et la province du Sichuan), les habitants de l'U-Tsang (au nord-ouest) et les Amdowa (de l'Amdo, nom tibétain de la province du Ginghaï). Les Zhuang, eux, sont regroupés selon leurs deux dialectes: Zhuang du nord et zhuang du sud. Enfin, les Mongols se partagent, d'ouest en est, entre Olots, Khalkhas( majoritaires),Dariangs et Horshens. La Mongolie intérieure chinoise accueille pour sa part les Ordos.


 

La robe de cour manchoue et son manteau ornés de broderies d'or et de motifs de dragons, de vagues et de nuages démontrent un véritable savoir-faire. Les Mandchous possèdent une longue tradition culturelle et leurs vêtements conçus pour la chasse ou la pêche étaient amples, sans cols, avec des manches en forme de fer à cheval capables de protéger les mains durant la chasse. Plus tard, ce genre de vêtement devint robe de cérémonie. Le peuple Dong, lui aussi possédait des tenues rituelles comme celle ci-dessous.


 

On distingue trois façons d'orner les tissus: La teinture, le tissage et la broderie. La teinture comportait le batik et une teinture dite « enchevêtrée » malheureusement difficile à décrire ici. Le batik ( qui est un terme javanais) est une technique d'impression des étoffes pratiquée dans différents pays du monde dont la Chine. Cet art requiert patience et minutie et consiste d'abord à dessiner sur le tissu le motif final à reproduire. Puis, on protège les zones du tissu contre la coloration par l'application d'une cire chaude. On applique ensuite les couleurs par trempage dans des bains de teinture ou bien en peignant directement les teintures sur le tissu et à plusieurs reprises. On applique d'abord les couleurs claires puis les couleurs foncées. Enfin, on ôte la cire avec un fer à repasser ou bien par trempage dans l'eau bouillante. Les origines du batik remontent à environ mille ans. En Chine, les peuples Maio et Bouyei étaient experts dans cet art. Les Zhuang, Daï et Tujia l'utilisaient aussi.

La deuxième technique, le tissage, permettait de réaliser le brocart, étoffe de soie rehaussée de dessins brochés d'or et d'argent. C'est en Chine qu'on trouve les exemplaires les plus anciens de brocart, comme le brocart Yunjin, qui datent à peu près du début de l'ère chrétienne. Depuis ce pays, le travail de la soie s'étendit ensuite aux régions perses et byzantines.

La troisième technique est la broderie. On en distingue plusieurs types dont la broderie pleine (faite en plumetis), la broderie au fil d'or, la broderie au point de croix et la broderie en poil de queue de cheval.


 

Nous l'avons vu, les ethnies minoritaires chinoises excellent aussi dans la pratique d'autres artisanats, comme le travail du métal. Ces techniques reflétaient un certain niveau de connaissance du groupe en question et consistaient à marteler, buriner, sculpter, creuser, tordre ou dorer le métal. Les Uygur pratiquaient aussi la dinanderie (travail du cuivre et du laiton) comme en témoigne ce superbe pichet de cuivre avec sa poignée en forme de boucle (ci-dessous) et aux motifs élaborés. Les Tibétains n'étaient pas en reste, reproduisant notamment des images de la secte ésotérique bouddhiste ou encore cette statuette en laiton doré qui représente le protecteur Vajra à l'époque de la dynastie des Qing (deuxième photo ci-dessous) Les Daï quant à eux travaillaient l'argent en réalisant de riches motifs.


 

La sculpture est une autre forme d'artisanat et permettait de donner forme au bois, au bambou, à la corne, à la pierre ou à l'os. On sculptait, burinait, épluchait, broyait ou pressait la matière pour donner la forme finale à deux types d'objets: Des objets de la vie quotidienne et des objets décoratifs. Les canoës (en photo ci-dessous) étaient faits de différents bois et étaient ornés de gravures peintes ou sculptées dans la matière et symbolisant les clans à l'aide de couleurs rouge, blanche et noire. On doit leur fabrication au peuple Gaoshan, lors de la seconde moitié du XX ème siècle. Les Gaoshan sont originaires de l'ile de Lanyu (Province de Taïwan). Cet ensemble de tribus disparates comptait en 2000 environ 5000 individus. Chaque tribu a sa propre langue, son propre système social et religieux, mais est de plus en plus assimilée.


 

Les Uygur ( ou Ouïghours) constituent quant à eux la plus importante des minorités nationales chinoises avec 9 millions environ de membres. Ils résident dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang de Chine ( appelée par eux le Turkestan oriental). Ce peuple de langue turque dont le nom signifierait « Alliance, unité » habitent traditionnellement en Asie centrale, dans les oasis du Taklamakan, les bassins de Turfan et de la Dzoungarie et dans une partie du Ferghana. Cette population connut une brillante civilisation jusqu'à leur absorption dans l'Empire mongol au XIII ème siècle. Elle était adepte de la teinture sur tissu, mais aussi de la sculpture sur bois comme en témoigne ce porte livres pliable ci-dessous.


 

Les minorités ethniques de Chine avaient aussi pour coutume de produire des objets laqués, en bambou, et de la vannerie. Les spécialités régionales étaient nombreuses et les objets résistaient à l'eau, au temps, tout en étant légers et ornementaux. L'exposition permet d'admirer des objets tibétains (panier laqué décoré d'or et de motifs floraux), des Yi (armure en cuir aux motifs peints) ou des peuples Maonan et She (qui réalisent de magnifiques chapeaux en bambou et faits main). Ces photographies ( et d'autres encore) sont visibles sur la médiathèque du site, dans l'album Asie.

Les masques font aussi partie de l'art de ces minorités chinoises. Ils représentent des visages aux traits accentués et sont richement colorés. Ils expriment des croyances sacrées en contraste avec le monde séculaire. On en distingue trois types: Les masque à suspendre, ceux qui sont utilisés pour les danses chamaniques et les masques d'opéra. Ces masques représentent la plupart du temps des dieux, des démons ou des bêtes. Les masques d'opéra Nuo sont quant à eux réalisés par le peuple Tujia et représentent tantôt des dieux gentils, tantôt des dieux méchants ou encore des figures séculaires. Le Nuo regroupe une importante quantité de rites sacrés traditionnels chinois, et pourrait bien être à l'origine de la légende du monstre Nian et de certains rites du Nouvel An chinois, sans oublier le personnage de Zhong Kui, dieu exorciste. On pratique encore de nos jours ces rites sous la forme de théâtre de rue. Ces rites sont l'une des expressions les plus anciennes de la culture traditionnelle de ce pays. Les figurants revêtent alors des masques et se rendent de foyer en foyer pour faire sortir les démons des maisons. Ci-dessous, un masque tibétain conçu pour la danse, et sur la deuxième photo, deux autres masques avec de gauche à droite la représentation du Dieu Nuo et de la Déesse Nuo.


 

Je vous conseille fortement la visite de cette exposition permanente qui est très riche en découvertes. Un seul regret: Le manque d'informations. Seul, une feuille mise à disposition gratuitement ( en anglais) à l'entrée de la salle permet d'aborder brièvement certaines techniques artisanales. N'oubliez pas non plus de vous rendre sur la médiathèque du site, sur l'album photos Asie afin de voir les autres photographies de cette sortie.

 

 

 

INFOS PRATIQUES:

 


  • Musée de Shanghai, 201 Ren Min Da Dao à Shanghai. Tel: 021 63723500. Entrée libre 

     

    Site internet : http://www.shanghaimuseum.net/cn/index.jsp

     

    Ouvert de 9h à 17h. On y observe en moyenne 5000 visites par jour et le musée se réserve le droit de fermer son accès si ses galeries deviennent trop bondées.

  • Salon de thé au 1er étage ( les pâtisseries ne sont pas de grande qualité, mais le café est correct). Accueil sympathique. Paiement cash uniquement.

  • Attention! Si vous souhaitez louer un audioguide pour la visite, merci de vous le procurer AVANT le passage des filtres de sécurité. Prix: 40 yuans ( + dépôt d'une pièce d'identité avec photo ou de 50 US$ ou 400 Yuans en garantie). Un petit prospectus vous est remis avec les numéros des commentaires disponibles, salle par salle , et un mode d'emploi .

  • Des expositions temporaires sont également offertes régulièrement. Leur accès est libre mais il est impossible d'y prendre des photographies. Elles sont annoncées par des affiches comme celle ci-dessous.

 


 

 

 












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