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De Combourg à Dinan
(Ille-et-Vilaine et Côtes d'Armor, France)
Heure locale

Lundi 9 mai 2022

 

Troisième sortie avec Soraya, pour son dernier jour en Bretagne, notre balade nous conduit aujourd'hui de Combourg à Dinan. Nous découvrons donc les terres intérieures de deux départements, l'Ille-et-Vilaine et les Côtes d'Armor, à travers deux villes logées dans un mouchoir de poche. Nous ferons un tour du centre-ville de la cité qui abrita Châteaubriand, avant de prendre la direction de Dinan, ville de Duguesclin. Nous trouverons même le temps de nous offrir une pause gourmande au magasin d'usine des Gavottes, ces délicieuses crêpes dentelles auxquelles il est difficile de résister.

 

Combourgeois et combourgeoises ont bien de la chance de vivre dans cette petite cité de caractère qui possède une étoile au Guide vert Michelin. L'imposant château qui se dresse telle une citadelle domine le lac Tranquille qui en reflète l'image. C'est que François-René de Chateaubriand descend d'une famille ruinée de la Guérande à Hénanbihen et de Saint-Malo où la famille du Rocher du Quengo s'est établie au début du 17ème siècle. C'est son père, René-Auguste de Chateaubriand, riche armateur malouin et corsaire en temps de guerre qui redorera le blason familial en achetant le comté de Combourg, un fief féodal, avec droits, vassaux et coutumes. L'homme, despotique et taciturne décède d'une congestion en 1786, seul, dans la tour dite de l'Est du château de Combourg. Le fils ainé, Jean-Baptiste héritera de la demeure, laquelle sera laissée à l'abandon d'autant plus que le frère de François-René sera guillotiné en 1794. Le domaine, alors confisqué, sera pillé et le château brûlé. La propriété, livrée à elle-même quatre-vingt ans durant, ce n'est qu'en 1848 que Gustave Flaubert passant par là en fera une description si élogieuse qu'une campagne de rénovation en deux parties verra le jours dès 1866. L'ouvrage sera alors remanié dans le style Troubadour très en vogue à cette époque.


 

Nous remontons bientôt en voiture pour nous rendre à Dinan, ville d'art et d'histoire. Une histoire dont on connait mieux les contours depuis le 11ème siècle bien que cette cité eut été occupée dès l'Antiquité. Je ne manquerai pas de faire une halte au magasin d'usine des Gavottes, ces délicieuses crêpes dentelle qui sont produites ici. Cette histoire croustillante commence en 1886 dans une cuisine quimpéroise. Ne sachant plus où donner de la tête, la crêpière en oublie une de ses crêpes sur le bilig (galetier). Hors de question de jeter cette crêpe trop cuite et Marie -Catherine Cornic (notre crêpière) l'enroule puis la mange, en découvrant une nouveau croustillant doré et léger. La crêpe dentelle était née !

Quelques années passent avant la création de la biscuiterie Gavottes à Quimper (29). Le geste fondateur de Madame Cornic est alors reproduit par de nombreuses pâtissières dans cette première fabrique du quartier de Loc Maria, avec ce geste identique consistant à enrouler huit fois la crêpe dentelle autour d'elle-même. En moins de temps qu'il n'en faut pour ...danser une gavotte à huit temps. D'où le nom de cette crêpe dentelle. Trente années plus tard, la biscuiterie s'industrialise face à l'engouement pour le biscuit. Le fameux geste est mécanisé grâce à un procédé d'enroulement unique au monde. La production de crêpes passe ainsi de 100 à 1500 crêpes dentelle dorées par pâtissière. Bientôt, la première biscuiterie quimpéroise devient trop petite et Dinan sera choisie pour y implanter une nouvelle unité de production de 4500 m2.

Après la crêpe dentelle nature, c'est à la crêpe dentelle au chocolat d'entrer en scène en 1978 : cette nouvelle production s'inscrit dans son époque et décline de nouveaux plaisirs intenses au chocolat (noir et au lait). 1990 est l'année d'intégration de la biscuiterie Gavottes dans le groupe biscuitier Loc Maria. Vingt ans plus tard, la marque Gavottes fêtera ses 90 ans, à une époque où l 'on croque la crêpe dentelle dans plus de quarante pays. Pour rester dans la course, rien de tel que d'inventer de nouveaux biscuits et Les Gavottes innove en créant de fines galettes au caramel et à la vanille de Madagascar ou au chocolat fleur de sel. Nous sommes alors en 2012. Un an plus tard, la récompense arrive et Gavottes obtient en 2013 le label Entreprise du Patrimoine Vivant, qui marque le savoir-faire et l'excellence de la biscuiterie. Le label vise en effet à distinguer les entreprises françaises détenant un « patrimoine économique composé d'un savoir-faire rare reposant sur la maitrise de techniques traditionnelles limité à un territoire.

2014 sera l'année de création de la pâte à tartiner maison. Cette pâte contient des éclats de crêpes dentelle, ce qui fait de cette gourmandise un plaisir à la fois onctueux et croustillant. Le succès de cette pâte ne se fait pas attendre puisque la pâte à tartiner sera élue « saveur de l'année » en 2016. Cette même année, les Gavottes lancent sa gamme de crêpes fourrées aux saveurs originales. La crêpe dentelle salée est née et investit le rayon apéritif. Il ne manquait plus que les Gavottines au chocolat lait et caramel et chocolat à la noisette pour couronner ce succès auquel il est dur de résister.

 

Une fois le coffre de la voiture rempli de crêpes dentelle, Soraya et moi nous dirigeons vers Dinan, à quelques kilomètres de là. Nous atteignons la cité médiévale en franchissant le viaduc tristement célèbre pour ses suicidés. Inauguré en septembre 1852, cet ouvrage remarquable fut conçu par l'ingénieur Mequin et Jules Fessard. Depuis ce pont, nous observons les imposants remparts admirablement entretenus : cette enceinte de murailles est à l'origine du nom donné à la ville. Dinan est en effet composé de « Din » (forteresse) et du suffixe « an », d'où ce nom de « petite forteresse ». Je ne suis pas retourné dans cette ville depuis plusieurs années mais rien n'a changé : les mêmes embouteillages depuis le viaduc jusqu'au centre-ville et même au-delà. Nous longerons un moment donné la place Duguesclin avec la statue équestre de Bertrand Du Guesclin, héraut qui défendit brillamment la ville assiégée par les troupes anglaises et les Bretons fidèles à Jean de Montfort, lors de la guerre de succession du duché de Bretagne en 1357.

Moins d'un siècle auparavant, en 1283, Jean Le Roux, duc de Bretagne, avait acheté la moitié de Dinan alors organisée autour des paroisses Saint-Malo et Saint-Sauveur. C'est à cette époque que la cité acquiert la ceinture de remparts qu'on lui connait agrémentée de plusieurs tours et d'un chemin de ronde de 2600 mètres encore intact aujourd'hui, un chemin percé par les portes du Jerzual, de Saint-Malo, de Brest, du Guichet et plus tard de Saint-Louis.

 

Impossible de tout visiter en une fois cette ville qui sera définitivement rattachée au Royaume de France en août 1532 et qui offre tout de même pas moins de 71 monuments historiques protégés. Je propose donc à Soraya de la conduire dans la vieille ville, du côté de l'église Saint-Malo réputée pour ses vitraux du début du 20è siècle et son orgue anglais aux tuyaux polychromes. A deux pas de là, nous nous arrêtons au couvent des Cordeliers qui fut fondé au 13ème siècle. Ce couvent accueillit en son temps les Etats Généraux de Bretagne en 1573 et en 1634. L'endroit est devenu depuis un établissement d'enseignement privé. Son portail, situé sur la place des Cordeliers a été classé en 1930. Ce quartier rassemble de magnifiques maisons à pans de bois qui font tout le charme de l’endroit. Dans une rue voisine, se dresse la tour de l'Horloge, beffroi du 15ème siècle haut de 45 mètres, qui symbolisait jadis la prospérité de la ville. Sa cloche qui tinte à intervalles réguliers fut offerte par la Duchesse Anne . Quant à l'horloge, elle fut achetée par la communauté de la ville en 1498.

 

J'invite bientôt Soraya à emprunter la rue du Jerzual (longue de 507 mètres) afin de descendre jusqu'au port de Dinan. Cette rue est la côte la plus célèbre de la ville et mieux vaut la descendre que la monter. Malgré le dénivelé de 75 mètres atteignant par endroits 35% de déclivité, de valeureux coureurs relèvent chaque année ce qu'on appelle ici le Défi du Jerzual, en effectuant une course à pied suivie par des milliers de spectateurs. Lors de notre visite, nous croiserons de nombreux touristes étrangers venus respirer l'atmosphère d’un Moyen-Âge pittoresque avec ses échoppes d'artisans, ses galeries d'art et ses cafés. Cette rue, qui fut jadis une artère commerciale pauvre et bruyante jusqu'au 19è siècle, est désormais devenue la rue la plus ancienne de cette cité et une curiosité touristique. Pendant des siècles, marchands, voyageurs et manants emprunteront cette voie unique extrêmement pentue qui formait un trait d'union entre la ville haute bourgeoise et la ville-basse commerçante et populaire. Les charrettes à bras y circulaient alors dans les deux sens, jusqu'au jour où intervint la construction du viaduc (en 1852), ouvrage qui permettra aux hommes et aux marchandises de rejoindre le centre-ville par une voie plus douce. Des artisans s'empareront alors du quartier pour y installer leurs ateliers. Et la rue du Jerzual d'abriter jusqu'en 1930 tisserands, vanniers et tanneurs, avant de tomber dans l'abandon. Il faudra attendre les années 1970 pour voir cette rue sortir de sa léthargie grâce aux artistes qui investissent les lieux, et restaurent ses maisons en ruines au point d'en faire aujourd'hui l'une des rues les plus coquettes de Dinan.

 

Arrivés au port, nous nous accordons une halte autour d'un verre tout en admirant les bateaux amarrés au quai. Dès le 12è siècle, l'endroit est une étape du négoce maritime breton. Et c'est d'ici que les toiles de chanvre et de lin fabriqués à Dinan s'exportaient dans toute l'Europe. Un siècle auparavant, son vieux pont existait déjà et marquait l'entrée de la ville. Et les bateaux de remonter l'estuaire au rythme des marées. Le temps passe et il nous faut repartir pour remonter dans la ville-haute, via un sentier longeant les remparts. L'endroit est escarpé mais nous conduit jusqu'au Jardin des Anglais d'où nous profiterons d'une vue imprenable sur le viaduc et le vieux port.


 

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