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Exposition "La Jeunesse au Moyen-Âge"
(La Tour Jean sans Peur, Paris, France)
Heure locale

Lundi 11 octobre 2021

 

Une fois de plus, La Tour Jean sans Peur nous gratifie d'une nouvelle page d'histoire en consacrant une exposition à la jeunesse au Moyen Âge. Vaste sujet que cet enfant dont notre société contemporaine a du mal à concevoir la préciosité et à propos duquel trop de présupposés erronés circulent encore. D'où cette exposition « La Jeunesse au Moyen Âge » qui tombe à point nommé pour rappeler qu'à cette époque, l’enfant était considéré comme une valeur sacrée : les plus petits étaient considérés comme des images vivantes de l'Enfant Jésus et même les adolescents appartenaient eux aussi à ce monde qui pardonne si besoin les erreurs de jeunesse.

 

Tout comme Dame Nature, la jeunesse a ses saisons : depuis l'Antiquité, la vie humaine est divisée en quatre « âges » qui ressemblent aux quatre saisons de l'année. Et Pythagore de considérer qu'un enfant du printemps a une complexion chaude et humide, différente de l'adolescent de l'été. Les gens d'âge mûr sont pour leur part froids et secs à l'image de l'automne et les personnes âgées, hivernales, affichent un tempérament froid et humide. Cette théorie survit au Moyen Âge mais des érudits envisagent le découpage de l'existence en sept âges dont les cinq premiers recouvrent l'enfance et la jeunesse. Cette fleur faite à la jeunesse ne suffit-elle pas à démontrer s'il en était besoin la sensibilité fine accordée à l'enfance moyenâgeuse ?

Il suffit de s'attarder un instant sur les âges de la vie pour découvrir que la vie était alors plus respectée qu'aujourd'hui : en effet, les parents considèrent que la vie active de l'enfant démarre dès l'infusion de l'âme, vers trente jours de grossesse pour les garçons et entre 40 et 90 jours pour les filles. Dès lors, le fœtus est en mesure d'éprouver des sentiments, au point de jouer, de prier, de rêver ou d'éprouver une sensation de peur dans le ventre de sa mère. Mieux, il a aussi une existence juridique puisqu'une femme peut par exemple ester en sa faveur ou doit s'acquitter d'une taxe supplémentaire aux péage lorsqu'elle est enceinte.

Où commence la petite enfance et jusqu'où l'adolescence se poursuit-elle ? Barthélémy l'Anglais apporte un éclairage à ce sujet en définissant de manière précise le cours de la vie humaine : l'enfance va ainsi de la naissance à l'âge de sept ans, tandis que l'enfant âgé entre sept et quatorze ans est toujours en enfance que le latin désigne toutefois sous le terme de pueritia. Enfin, la troisième étape (de quatorze à vingt et un ans) figure sous le nom d'adolescence (adolescentia en latin) ou âge de l'engendrement, un âge pouvant chez certains durer jusqu'à vingt-huit ou trente ans.

Le quatrième âge de la vie, lui, court jusqu'à quarante ans et porte le nom de « jeunesse ». Surprenant n'est-ce pas ? Chez les aristocrates, il va de l'adoubement au mariage tardif, auquel succède l'état d' « homme parfait » (ou « moyen âge ») jusqu'à l'âge de cinquante ans. Au-delà débute la vieillesse avec l'âge d' « antiquité ».

Et le vécu social dans tout cela ? L'âge de raison est fixé à sept ans et la majorité, à quatorze ans, ce qui n'exclut pas l'observation de césures comme celles relatées par un maitre de novices anglais du 12è siècle, Aereld de Rievaulx, qui estime que l'enfant de trois ans entre dans la phase de « l'esprit de science », de « l'esprit d'intelligence» dès l'âge de six ans et de « l'esprit de sagesse » à sept ans.

Chaque âge de la vie a ses images qui soulignent les spécificités de l'enfance : à sa naissance, l'enfant est au berceau. Puis, on lui offre un trotteur ou un cheval-bâton pour lui apprendre à marcher. A sept ans, il manipule une toupie, un jouet qui permet une réflexion physique sur le monde. L'enfant dispose aussi de ses premières armes (arc ou épée) façonnées à sa taille. En grandissant, les jeunes sont vêtus à la dernière mode et arborent un faucon au poing, à un âge où ils sont assez grands pour séduire et chasser, voire gagner une réputation ou faire fortune en participant à un tournoi.

 

La jeunesse au Moyen Âge passe aussi par l'âge de discrétion, celui du mariage, celui de la majorité et ce qu'on appelle « la seconde naissance » :selon l'Eglise, l'enfant doit avoir atteint l'âge de sept ans, aussi appelé « âge de la discrétion » ou « âge du discernement » pour pouvoir se fiancer, et celui de douze ans pour pouvoir se marier. Pour des raisons politiques, cette norme ne s'applique pas aux familles royales dont les progénitures peuvent être fiancées ou mariées à trois ans, à l'exemple de Marguerite d'Autriche (qui fut répudiée à onze ans puis remariée à dix-sept!). Sept ans est enfin l'âge du catéchisme et de la confirmation, qui autorise l'enfant à communier, à recevoir les ordres mineurs ou à être offert à un monastère. Toutefois, à partir du 12è siècle, il aura le droit de renoncer à la clôture.

Douze ans peut paraître jeune pour se marier mais le Christ n'a t-il pas débuté sa vie publique à cet âge ? Douze ans correspond donc à l'âge de la responsabilité juridique puisqu'un jeune peut conclure une vente, rédiger son testament ou servir de témoin dans une affaire criminelle. Entre dix et douze ans, les petits nobles sont envoyés loin du giron familial, en formation chez un oncle ou un ami de leur père plus prestigieux que lui. A douze ans, une fille peut devenir marraine (contre quatorze ans pour devenir parrain).

Quatorze ans est justement l'âge de la majorité pour un garçon. L'âge du service militaire, du guet et de l'arrière-ban. Quinze ans est le moment où l'on juge l'enfant « en âge » d'entrer en possession d'un fief, d'élire sa sépulture, voire de devenir chanoine ou cardinal ! Passé cet âge, l'enfant des milieux populaires est souvent mis en apprentissage. Là encore, les règles communes ne s'appliquent pas toujours aux rois, dont l'âge de la majorité fluctue :chez les Germains, celle-ci était fixée à quatorze ans mais il arriva que des rois carolingiens aient été couronnés dès treize ans (puis à partir de vingt et un ans dès le 11è siècle afin d'éviter la gouvernance d'enfants immatures).

Le mariage, lui, est plus tardif : entre vingt et vingt-quatre ans pour les filles et vingt-six à trente ans pour les garçons. Sauf cas exceptionnels comme lors des épidémie du 14è siècle (mariage avancé vers vingt-cinq ans pour les garçons, et entre treize et seize ans pour les filles). Le cas de la peste noire (et la mortalité qu'elle entraine) imposera même un nouveau modèle conjugal avec cette maxime « Prends-la enfant pour être content ». Imparable. Le 15ème siècle verra remonter l'âge du mariage à trente ans pour les garçons et vingt ans pour les filles.

Chez les nobles, l'acte final de l'enfance est l'adoubement ou « seconde naissance »:entre les 11è et 12è siècle, l'adolescent âgé de seize à vingt ans entre en chevalerie, se présente à la cour devant un grand seigneur et ses barons, et devient alors pleinement adulte.

 

Au Moyen Âge, la famille désigne le groupe de personnes vivant sous le même toit, avec nourrice et serviteurs, mais également le noyau conjugal. Et la famille réduite aux parents et à leur progéniture d'être même le modèle dominant. Quant aux grands-parents, leur rôle affectif est indiscutable mais, compte tenu de l'espérance de vie réduite, les enfants ont rarement la chance de les connaître. A cela vient s'ajouter une parenté spirituelle des parrains et marraines. Au sein de la famille, tous les petits sont choyés, les garçons comme les filles. Frères et sœurs forment ainsi une fratrie solidaire où les premiers-nés sont destinés à remplacer le père ou la mère décédés. Dans les familles nobles, même s'ils ne vivent pas sous son toit, les bâtards du père sont pris en charge tandis que les épouses légitimes sont priées de s'occuper de leurs conditions de vie et de leur éducation. Enfin, le monde marchand a également ses propres règles : la mise en nourrice à la campagne permet aux mères de reprendre leur activité et aussi de retomber enceinte. Les fils d'aristocrates partent en formation dans un château lointain, la mort du père et la mise en apprentissage obligeant nombre d'enfants ruraux à vivre en famille d'accueil, qu'elle soit familière ou étrangère.

Si l'Eglise encourage la procréation pour le gloire de Dieu, les motivations des parents, elles, sont plus triviales : le fait d'avoir des héritiers permet de perpétuer la mémoire des ancêtres, mais avoir beaucoup d'enfants est gage de main-d'oeuvre à bas prix, surtout chez les ruraux. En effet, les fils ne pouvant s'installer à leur compte sans avoir hérité garantissent alors à leurs parents les bons soins jusqu'à leur décès en échange du gite ou d'une donation.

 

Cette jeunesse moyenâgeuse connait aussi l'essor de la puériculture : on emmaillote le nouveau-né, on le déshabille pour la tétée, on le baigne avant de lui faire faire ses premiers pas une fois passés les premiers mois. On allonge le nourrisson sur le dos pour sa bonne croissance, dans un berceau à bascule, à roulis ou à tangage (en Italie). Le bébé est ainsi bercé en musique, ou au chant des « berceresses ». En complément de l'allaitement, des bouillies (faites de pain enrichi de miel, de vin et de lait de chèvre) complètent la nourriture de nouveau-né dont le sevrage intervient à l'âge de deux à trois ans. Des régimes de santé sont de la même façon prescrits par des médecins à travers la prescriptions de menus pour les moins de sept ans. Au programme : viandes blanches de jeunes animaux, sans sauces aux épices, agrémentés de fruits froids et humides, une pomme cuite matin et soir, et des cerises, prunes, poires et melons en journée. On traite le nourrisson avec douceur en lui évitant de pleurer et en s'efforçant de décrypter ses songes. Les jouets qui lui sont offerts contribuent à l'accoutumer à la vie sociale. Reste l'angoisse de la mort du nourrisson que les parents conjurent en recourant à une protection spirituelle en gravant une étoile de David sur le berceau.

La bonne santé est garante de la bonne humeur, et on soigne l'enfant souffreteux. La pédiatrie qui nait alors s''intéresse aux cauchemars et aux problèmes psychologiques de l'enfant et conseillent de brûler sous son lit des plantes médicinales, fougères ou armoise, afin de le rendre « gai et beau ». En Italie, on recommande même la consommation de vin coupé d'eau pour les enfants de trois à sept ans car la vigne est synonyme de « vita » (vie) et le vin est réputé être un bon vermifuge et un anti-diarrhée.

Lors de l'adolescence, certains jeunes gens trop bien nourris souffrent parfois d'obésité, surtout en Italie. Et de leur interdire alors le sucre. Dans tous les cas, les jeunes sont pris en charge par les hôpitaux et dès le 7è siècle lorsque les familles ne peuvent plus subvenir aux besoins de leur descendance. Enfants abandonnés et orphelins sont placés sous la protection des Saints-Innocents, comme à Florence, ou du Saint-Esprit comme à Dijon, Montpellier ou Nuremberg. D'autres saints spécialisés dans la protection infantile sauvent miraculeusement les enfants des périls qui les guettent, jusqu'à ce que s'impose, à la fin du 15ème siècle le nouveau protecteur : l'ange gardien.

La mort fait quant à elle partie de la vie de l'enfant, même si, élevée, celle-ci ne remet pas en cause le renouvellement de la population. Et les nourrissons d'être inhumés dans des niches creusées dans les murs de fondation de l'église. Les enfants sont également enterrés sur le parvis, ou le long des murs des églises. Quant au baptême, il est rapidement administré aux nouveaux-nés par crainte de leur décès prématuré. Reste le sort des enfants morts-nés qui n'ont pas tous reçus un baptême dans l'urgence et n'ont pas droit à la terre sacrée. Longtemps rejetés, ils bénéficient dès le 12è siècle du « limbe » des enfants, un espace particulier de l'enfer où les petits morts sans baptême dorment éternellement sans souffrance. Cela ne suffit pas aux familles qui en appellent à Marie, sainte patronne de l'enfance. Des chapelles dédiées à la Vierge sont bientôt édifiées pour accueillir ces enfants et l'on prie pour leur résurrection et leur droit d'accès au paradis.

 

Au Moyen Âge, les principes de base éducatifs sont l'obéissance et le respect des parents. Cependant, tout dépend de l'âge : si les caprices des petits sont jugés avec indulgence, un enfant qui a atteint l'âge de raison est jugé avec sévérité (fouet et intimidation psychologique) tout en utilisant la peur du croquemitaine, même si les maitres d'école sont divisés sur le chapitre de la punition corporelle.

Le comportement de filles est plus étroitement surveillé que celui de leurs frères, et un traité s'applique à elles, qui réglemente leur existence à la maison, dans la rue et à l’église. Jusqu'au 13è siècle, il n'est pas conseillé d'apprendre à lire aux femmes, tout juste bonnes à coudre et à filer. Heureusement, les mentalités évolueront par la suite et Christine de Pizan publie en 1406 un traité d'éducation à la fille de Jean sans Peur. Pour elle, « Il n'est aucune tâche trop lourde pour une femme intelligente » qui doit pouvoir remplacer un homme qui voyage pour affaires ou pour faire la guerre.

L'exposition présentée fait aussi référence aux fils du ciel, ces enfants de sept ans offerts par leurs parents aux monastères,au sein desquels ces oblats trouvent sécurité, soin (quand ils sont handicapés) et instruction. On apprend d'abord aux novices à bien se comporter sur le chemin de l'école, à l'église et à table. Le silence est de rigueur dans les rangs tandis que les enfants se voient enseigner le langage des signes à partir du 11è siècle. Réveillés dès que le jour naturel autorise la lecture, les novices quittent leur logis pour se rendre à l'école située près de l'église. Après les prières, ils se rendent à la bibliothèque et lisent à haute voix. Ils enchainent alors avec trois heures d'étude, agrémentée de grammaire, logique et philosophie. En guise de récréation, les enfants jouent aux billes, au cerceau, à la balle, jonglent ou s'exercent à la crosse.

Tout le monde n'a pas le goût de l'étude et les jeunes manuels s'affirment à partir de douze ans. Au champs, ils chassent les oiseaux, ramassent les limaces dans les vignes et le petit bois pour alimenter le foyer. S'il veut devenir berger, il devient gardien d'oies dès l'âge de huit ans, puis de pourceaux. Entre dix et onze ans, il mène l'attelage des chevaux de labours et à quatorze, il se voit confier la charge d'un troupeau de 200 brebis. Les filles aident aux travaux domestiques, en surveillant les derniers-nés, en nourrissant les poules et en cueillant les légumes du potager. Elles apprennent également à coudre et à filer la quenouille, tout en aidant à la corvée d'eau et en menant les bêtes au pré.

Après l'apprentissage de la foi, celui du métier est le plus important. Dès le 13è siècle, des contrats d'apprentissage définissent les droits et devoirs des adolescents placés à l'âge de treize ans chez un artisan ou un boutiquier. Ce placement peut durer dix ans et le jeune n'a ni le droit de s'enfuir, ni celui de se fiancer ou de se marier. En échange, l'artisan lui apprend un métier, le nourrit et le vêtit. Il lui procure aussi les soins lorsqu'il est malade. Les enfants d'artisans et de marchands, eux, apprennent à lire , écrire et compter. Au 15è siècle, les fils des grands marchands normands, flamands et anglais font même l'objet d'échanges linguistiques au pair, tandis que d'autres accompagnent leurs père dans des voyages maritimes au long cours.

Il existe aussi l'éducation militaire pour les jeunes nobles de dix à douze ans qui sont élevés au sein d'un groupe de congénères (jusqu'à une centaine dans une cour royale). Ces jeunes pratiquent la gymnastique, la lutte, et des matchs de crosses à l'aide de boules de bois. Ils acquièrent ainsi l'esprit de compétition et les vertus de l'effort en équipe. D'autres sports (course à pied, natation, tir à l'arc, saut en hauteur et en longueur, lancer de poids ou de javelot...) sont aussi pratiqués. Initiés à l'escrime, les jeunes, placés sous la férule d'un maitre d'armes s'habituent à manier les armes lourdes . Le développement de la puissance musculaire prime sur toute autre considération. Le garçon doit vivre à la dure en prévision de ses futures campagnes militaires en s'habituant à la pénurie de vivres, en mangeant et en buvant peu et en supportant la douleur et le froid. On l'habitue de même au port de la cotte de mailles, puis de l'armure (qu'on lui conseille de porter jour et nuit). Quant à l'équitation, elle est enseignée dès l'âge de quatre à cinq ans. Enfants et poulains sont alors mis en présence histoire d'apprendre à se connaître puis on apprend à l'enfant à monter en croupe derrière un adulte avant de le laisser chevaucher un poney ou un mulet. On se livre ensuite à des courses de chevaux entre pages, avant de pratiquer la joute équestre (celle-ci est l'apanage des grands adolescents maitrisant l'art de la monte). Les plus petits, eux, se contentent de jouter à la quintaine, mais à pied, ou montés sur un petit cheval d'arçon à roulettes.

 

La jeunesse a bien sûr ses défauts : outrecuidante, excessive ou même colérique, celle-ci est parfois fêtarde comme le jeune François d'Assise, dilapidant le patrimoine familial en bals et banquets, flambant au jeu, se battant ou courant les filles. Ne dit-on pas qu'il faut que jeunesse se passe ? Il n'empêche que la jeunesse est vue comme une source de désordre social, que ce soit dans l'aristocratie, dans la bourgeoisie ou la paysannerie. Le pire étant l'absence de toute fonction chez un jeune qui le livre alors à toutes sortes de violences. Le Moyen Âge témoigne de viols collectifs au détriment des orphelines, femmes seules, servantes ou jeunes veuves. Les traités de contenances enseignent bien à la jeunesse à respecter les biens d'autrui ainsi que les personnes mais certains n'en ont cure. Insolences et gros mots font pourtant l'objet de corrections en règle, au même titre que les signes insultants. Dès le 13è siècle, les édiles tentent de limiter les excès des jeunes en ouvrant des fraternités et des « abbayes de jeunesse » où les délinquants apprennent à respecter les règles de la vie en société. Deux siècles plus tard, et face à l'augmentation de la violence juvénile, la répression s'organise pour le meilleur (on invite les jeunes débordant d'énergie à participer à des jeux équestres, des joutes nautiques ou autres concours de tirs dotés de prix...) et pour le pire (A Florence, on fait caillasser les jeunes délinquants et lapider les morts au gibet par...d'autres enfants!).

 

Les bonnes manières sont nées dans les monastères et sont enseignées dès le 7è siècle. De leur côté, mères et nourrices assènent au jeune enfant les obligations de la vie sociale, tandis que les pères conseillent les adolescents en les mettant entre autres en garde contre les « désirs mondains ». Au 13è siècle, fleurissent les traités de bonnes manières destinés aux enfants de nobles et aux marchands qui ne vont pas longtemps à l'école. Il en existent plusieurs comme « Le Livre des bébés », « Le Petit livre des petits enfants » ou « Urbain le Courtois ». Certains ouvrages, tels les livres de contenances ou « honneurs de la table » énumèrent une longue liste de gestes interdits. Et de recommander ainsi aux jeunes qui font le service au château de rester debout, d'ôter leur chapeau et de saluer devant un seigneur. Quant aux plaisanteries et aux grossièretés, elles sont réservées aux adultes.

Il existe de nombreux livres princiers contenant le précieux savoir. Si, au 13è siècle, une fille de laboureur peut oser demander un livre de psaumes à son père et le siècle suivant, ou que certains marchands aisés offrent à leur descendance un alphabet et une grammaire élémentaire., seuls les enfants de la haute aristocratie possèdent des livres illustrés. Dès le 14è siècle, la lecture fait partie des nouvelles compétences exigées des jeunes nobles. A l'âge de trois ou quatre ans, les bambins reçoivent des psautiers et des livres d'heures avec alphabet mais les bibliothèques des petits princes restent modestes. Les pédagogues conseillent pourtant la lecture de livres d'Histoire, soit ancienne, soit contemporaine, et il est fortement recommandé aux petits princes de lire les traités de « bon gouvernement », sans négliger les auteurs grecs et latins et en alternant avec des romans de chevalerie et les chansons de gestes, même si contes et fables sont déconseillés par les maitres car trop attrayants à leurs yeux. Il s'agit pourtant de donner le goût de la lecture à cette jeunesse assoiffée de découvertes et d'aventures. A chacun son ouvrage : la forme rimée (comme l'abécédaire de Marie de Bourgogne en 1480) facilite la mémorisation et l'amusement, tandis que la forme dialoguée interpelle le jeune lecteur grâce au tutoiement. La forme même du livre et de l'écriture encourage la lecture, d'où la prédominance de petits formats, plus maniables, et écrits en grosses lettres.

 

L'enseignement des arts à la jeunesse n'est pas à négliger : les jeunes nobles apprennent à entretenir les armes, à soigner les chevaux, les chiens et les faucons pour la chasse. Plusieurs traités répertorient ces activités, dont plusieurs composés pour des enfants et des adolescents. Pendant que les plus petits jouent « à la guerre » les plus grands compulsent des manuels illustrés pour y apprendre l'art militaire. Ainsi, le premier traité d'enseignement de l'escrime est allemand et date du 13è siècle. On y découvre les différentes positions qui permettent de déséquilibrer l'adversaire à l'épée et à la lutte. Excellent complément de formation, l'apprentissage d'une langue étrangère est une obligation pour les nobles qui nouent des alliances en mariant leurs enfants à l'étranger, ou dans les milieux marchands côtoyant les marchés européens. Au 15è siècle, des dictionnaires de langues autorisent l'apprentissage du portugais et de l'espagnol, mais aussi du provençal, du lorrain, et du breton grâce à des livres de grammaire bilingues voire trilingues.

Les arts d'agrément ne sont pas en reste : les échecs sont enseignés aux jeunes nobles dès l'âge de six ans pour certains, entre sept et douze ans pour d'autres. Ce jeu, qui permet d'élaborer des stratégies, devient le modèle de la vie politique dûment moralisée. Et des traités à visée didactique sont offerts aux jeunes. A l'adolescence, on lit également des traités de courtoisie, avant de plonger , au 15è siècle, dans les romans d'initiation sentimentale. La séduction intellectuelle faisant partie du jeu amoureux, les jeunes doivent exercer leur vivacité d'esprit. La vie de cour, propice aux jeux de société, offrent de nombreuses occasions festives au cours desquelles se déroulent des danses. La « science et art de danser » appelle aussi un enseignement. Et les premier traités en la matière d'apparaitre en Italie au 15è siècle.

 

INFOS PRATIQUES :

  • Exposition « La Jeunesse au Moyen Âge », jusqu'au 29 mai 2022, à La Tour Jean sans Peur, 20 rue Etienne Marcel, à Paris (2è). Tél: 01 40 26 20 28. Ouvert du mercredi au dimanche de 13h30 à 18h00. Entrée : 6€. Métro : Etienne Marcel. Site internet : https://tourjeansanspeursite.wordpress.com
  • Le catalogue de l'exposition contient une foule de détails sur l'exposition, et est en vente à l’accueil.

  • Mes vifs remerciements à Agnès Lavoye pour son aide précieuse.

 



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